Article lundi.am
[Alèssi Dell’Umbria]
ISBN : 9791094512197
https://editionslatempete.com/antimatrix/
Dans ma bib' !
https://bib.vincent-bonnefille.fr/book/58
Critique de Platon, Marseille
Tontine et autres réseaux extra capitalistiques
Angles morts, vie à crédit...
Or cet élargissement du « pouvoir d’achat » (quelle horreur, cette expression !) est lui-même fictif. Il repose sur de l’endettement, c’est-à-dire sur le fait d’étaler dans le temps le prix des choses. C’est de l’argent potentiel qui est posé comme effectif. Par la grâce du crédit, l’individu semble affranchi des limites de son salaire…
Que tout cela explose un jour ou l’autre ne fait que montrer à quel point le capitalisme est devenu ingouvernable. Qu’est-ce que cela veut dire ? Gouverner c’est prévoir. Or la dynamique du capital a introduit une temporalité incontrôlable : les gouvernants pouvaient encore la contrôler dans une certaine mesure du temps des États-nations, avec le retour général au protectionnisme après 1929, le New Deal et le fascisme, ils ne le peuvent plus dans un univers aussi mondialisé. Même Trump n’a pu revenir au protectionnisme annoncé (comment le pourrait-il, du reste, quand une grande partie de la dette US est détenue par des Chinois ?!). Gagner du temps est devenu leur seule préoccupation, ça a été flagrant tout au long de la pandémie de covid-19. Ce qui passe par une politique de terreur à l’égard des foules révoltées.
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Le hawala (qui se décline au masculin et non au féminin comme je l’ai fait dans Antimatrix) c’est de l’argent qui circule sans se déplacer et sans passer par un régime d’écriture. Ce sont principalement les immigrés qui y ont recours, mais aussi des négociants, en faisant intervenir aux deux extrémités un intermédiaire, le hawaladar qui demande à un autre se trouvant dans le pays concerné de régler telle somme à telle personne. Après, la dette que le premier hawaladar a contracté à l’égard du second de par ce transfert purement oral pourra être réglée en argent, à l’occasion d’une transaction identique en sens inverse, ou bien en marchandises (il semble qu’une partie du négoce transitant par le quartier Belsunce, à Marseille, s’opère ainsi). Le hawaladar prend une petite commission, mais elle ne pèse pas lourd si l’on compare avec ce que coûteraient les taxes et les taux de change. En somme, ce transfert qui consiste à créer une dette suppose l’existence de liens et d’attachements inconnus du monde occidental.